Notes

J'ai l'impression de ne pas être sérieux. Je semble frôler le ridicule, effleurer le risible, susciter l'ignorance. Il faut toujours avancer davantage pour que les gens vous prennent réellement au sérieux. Faire un pas de plus, frôler l'irréversible, quitter le réel. On attend. On attend en se disant que tout s'arrangera avec le temps, en ignorant la réalité. On vous pousse davantage dans le vide en cherchant à vous éloigner du précipice. Amusante réalité. On sourit, et l'on attend que le malade tente de partir pour l'aider à rester. On sourit, et l'on attend que la plaie s'infecte, avant de la soigner. Et l'on vous rassure. Et vos blessures ne cicatrisent pas. On les camoufle sous un tapis de roses et de plumes pour les rendre plus légères. Mais je sais, nous savons, qu'au fond de nous, ces failles s'agrandissent, et nous sombrons. On sombre dans ces failles que la société a agrandi, quoiqu'il m'est trop facile de rejeter sur le dos de la société ce qui est peut-être simplement de ma faute. Peut-être qu'être pris au sérieux, être considéré comme je l'imagine sans avoir fait de séjour en HP, sans avoir eu le courage de franchir le cap, le couteau à la main, refermerait un peu ces failles. Ou peut être que ces failles sont définitivement ouvertes. Qu'à cause d'un manque de courage je serai incapable de les refermer. C'est tellement plus facile de justifier le fait qu'une barque n'avance pas par le manque de courage de celui qui tient les rames, alors que les rames l'ont quitté depuis fort longtemps. De se dire qu'il est encore possible d'avancer, alors que vous voguez dans un océan de pensées, sans jamais savoir où vous emmène la houle. Je ne sais pas quoi faire. Rester dans cette vie en ignorant les chutes vertigineuses qui m'emmènent au fond de l'océan est insupportable. Ecouter ces gens qui me répètent que tout ira mieux prochainement, que je vais être pris en charge, alors que je sais pertinemment que l'espoir est mon pire ennemi. Il est celui qui fait croire à ceux et à celles qui m'aiment que je peux encore m'en sortir. Moi en premier. J'attends. J'attends la suite de ma vie, sans aucune envie. J'attends dans les larmes et la musique. J'attends de contempler le moment où je ferais le pas que je n'ai jamais osé faire, et qui m'apportera sans doute un peu plus de considération. Je pense pas à remonter grâce à cette dernière, car penser amène l'espoir, l'envie, deux choses que je ne consomme plus depuis longtemps. J'attends au fond de moi le seul moment où l'on acceptera de me laisser remonter jusqu'au ciel. Le ciel fait peur aux gens qui sont sur terre. Mais lorsque l'on monte au ciel, on quitte le fond de l'océan, pour toujours.