Notes

[#metoo #balancetonporc]

D’abord, ça a commencé avec M. Baffie, lorsqu’il a soulevé la jupe de Nolwenn Leroy sur l’émission « Salut les Terriens ». Son explication ? Montrer le cul de Madame Leroy permettrait de booster les audiences. Puis, il s’est drapé dans l’indignation en utilisant cette magnifique excuse, utilisée avant lui par des générations de connards, « c’était pour rire » (et si tu ne ris pas, tu es une féministe hystérique et mal-baisée). Evidemment, perpétuer les clichés misogynes (je te touche sans ton autorisation, je soulève ta jupe sans ton autorisation parce que ta seule utilité, c’est montrer ton cul), c’est très drôle.

Tout comme, il est très drôle – voire hilarant – de faire des commentaires sur l’habillement d’une femme. Ou de lui mettre la main aux fesses dans les transports publics. Ou de la siffler dans le rue tout en lui lançant un – très fin – « je me demande ce que tu caches sous ton pull ». Ou de l’agresser sexuellement « parce qu’elle n’a pas vraiment dit non ». Bordel, qu’est-ce que je me marre !

Et puis il y a l’affaire Weinstein. Qui démontre une fois de plus qu’une femme seule ne peut pas être crédible lorsqu’elle dénonce un agresseur. Elle doit être multiples. Avec des preuves tangibles, ça serait encore mieux. Que la loi du silence règne toujours dans notre société. Peut-être que lui aussi se trouvait très drôle. Il pourrait l’utiliser comme défense : « C’était pour rire. Je demande des massages et des faveurs sexuels parce que je suis un vrai clown ».

« Est-ce que la toile, les réseaux sociaux ou les médias sont les bons endroits pour libérer la parole ? », se demandait un petit bonhomme infect, « Je trouve ahurissant de voir ce lynchage public sans aucune preuve. C’est dans un tribunal qu’il doit être juger » (pour les petits curieux, il s’appelle Éric Zemmbeurk).

Oui. J’espère qu’il sera jugé dans un tribunal. J’espère que tous les porcs seront jugés dans un tribunal. Je n’aime pas non plus le déballage médiatique et les jugements faciles que nous pouvons porter sur des faits dont nous ne connaissons qu’une partie de l’histoire. Oui mais…

Oui mais… Je refuse de mettre en doute la parole d’une femme parce qu’il y a en assez d'autres pour le faire.

Oui mais… Se rendre chez l’avocat et s’entendre dire : « Oui il vous a maté pendant plus de six mois lorsque vous vous changiez dans sa salle de bain. Oui il a avoué (puis s’est rétracté). Oui c’est un crime. Mais le parcours sera long. Vous n’êtes pas sûre de sortir gagnante car il peut trouver des gens qui attesteront que vous êtes une allumeuse. Il était chez lui, devant sa fenêtre. Difficile de prouver qu’il vous matait ».

Oui mais… Parce que c’est parfois difficile de prouver une agression.

Oui mais… 85% des femmes qui portent plainte contre un harceleur dans le cadre de leur travail se retrouvent à la porte (parce que ça sera quoi la prochaine fois ?).

Oui mais… Difficile d’aller porter plainte lorsque l’on sait que certaines femmes sont accueillies par « Vous portiez quoi comme habits ? Vous aviez bu ? » (Parce que c’est d’accord que tu aies été agressée mais certaines conditions doivent être requises pour être prise au sérieux comme un habillement de nonne et un taux d’alcoolémie à 0).

Oui mais… Il y a la culpabilité. La honte. La peur.

Oui mais… La parole d’une femme agressée est remise en doute, questionnée (le tango se danse à deux), jugée, pesée, ignorée, banalisée.

Oui mais… Est-ce que c’est vraiment une agression ? Est-ce que c’est vraiment un harcèlement ?

Oui mais… Nous avons toutes le droit de partager notre histoire.

J’espère (fort naïvement, je le reconnais) que le mouvement du #metoo et du #balancetonporc aura des effets positifs sur notre société et sur la libération de la parole.

J’espère que les femmes agressées se sentent moins seules aujourd’hui et qu’elles osent aller porter plainte (les centres LAVI proposent un accompagnement et une aide juridique). J’espère que les jugements hâtifs seront questionnés. J’espère que nos politiques durcissent la loi sur le harcèlement et l’agression (Mathias Reynard a déposé un postulat pour étudier l’ampleur du harcèlement de rue). J’espère que nous continuerons à dénoncer une société patriarcale qui accepte encore le harcèlement et l’agression envers les femmes comme quelque de banal (car existant depuis toujours).

Mais les changements sociétaux passent aussi par nous. A nous de ne plus détourner les yeux lorsqu’une femme se fait agresser dans la rue. A nous de dénoncer ce collègue qui se permet des gestes déplacés. A nous d’accueillir le récit d’une agression sans remettre en doute ou banaliser. A nous de reconnaitre qu’une agression – qu’elle soit physique ou verbale – n’est pas acceptable (nous ne sommes plus au Moyen-Âge, nous savons dorénavant que les femmes ont un cerveau et qu’elles se rendent donc compte des gestes inappropriés ou des paroles déplacées. Si, si je vous le promets). A nous d’éduquer les générations futures. A nous de voter des lois pour la protection des femmes agressées, harcelées. A nous de rappeler que ce n’est pas une « histoire de femmes » mais bien une histoire d’êtres humains.
Ne soyons plus des témoins silencieux, parce que « pour triompher, le mal n’a besoin que de l’inaction des gens de bien ».

Alors ce soir, je vous embrasse femmes courageuses, fortes, résilientes.

Alors ce soir, #metoo je lève un poing rageur avec toutes les femmes qui #balancetonporc. Je #balancemonporc et je le laisse moisir dans sa fange.