Notes

Riche de mes deux cultures européenne et antillaise , Décembre est mon mois favori. Quelque soit mes états d’âme, à l’approche de cette merveilleuse fête de la Nativité , je retrouve mon coeur d’enfant, ma sérénité, une paix intérieure, une soif de tendresse et de partage.

Est-ce l’air du temps ambiant qui règne ici qui me donne à moi aussi l’envie de raconter un Noël aux Antilles en particulier dans mon île la Martinique, toujours est-il que je suis saisie à mon tour de la fièvre qui s’empare de tout un chacun, pour la préparation de la plus belle fête pour les uns, la plus triste pour d’autres.Même si j’ai une vraie pensée pour ces derniers, ne nous attardons pas là-dessus, nous y reviendrons une autre fois.

Donc Décembre...La nature elle-même s’y mêle puisque les Alizés délaissant leur douce et tiède brise , se transforment en vent disons...plus intrépides, apportant un peu plus de fraîcheur avec quelques degrés de température en moins.
Dans mon jardin, les orangers et les mandariniers avec arrogance regorgent de fruits, les lauriers roses et les bougainvilliers déversent impudiques leurs bouquets et autres bractées.
Dans mon quartier, dans la rue, les gens, après le bonjour rituel, ont presque tous ces mots à la bouche...<<ça sent déjà Noël, f....ka fè frèt !!! >>

C’est la belle saison qui arrive, les menaces de cyclones se sont éloignées, nous voilà tranquilles pour quelques mois, les jours déjà courts rapetissent un peu plus... alors que faire de nuits aussi longues ?
Même si la tradition reste la même ( à quelques détails près tout de même) mon plaisir sera de vous décrire le Noël de mon enfance, plus authentique à mes yeux que celui d’aujourd’hui.

Ici, les préparatifs commencent dès la mi-novembre, fête familiale et religieuse , personne n’oublie qu’il s’agit de célébrer la naissance du Christ ...bien que de nos jours les choses évoluent également et deviennent profanes et mercantiles.

Dans ma jeunesse, voisins et amis organisaient chez eux à tour de rôle des soirées où cahiers de chants en main , ils entonnaient des cantiques accompagnés par quelques instruments de musique pas très orthodoxes, plutôt de fortune, tels que 2 cuillères l’une contre l’autre , le cha-cha, boite de conserve remplie de graines à l’intérieur qui servait de maracas , un long bout de bambou, sur lequel on tape avec des baguettes,un couteau contre le verre d’une bouteille vide, et quelques fois avec de la chance, une guitare, un accordéon, un harmonica.
Nous les enfants empruntions du papier de soie posé sur les dents d’un peigne , et le son de notre voix vibrant à travers le peigne devenait instrument de musique.

Dans les cuisines déjà fleuraient bon le sirop de groseille et le shrub (Rhum blanc dans lequel auront macérées des peaux d’oranges séchées), il faut dire que dans ces «chanté Nwel» , la convivialité et la chaleur humaine étaient de mise, Qui apportait petits pâtés salés, Qui du jambon,boudin , petites gourmandises à déguster, le punch, la limonade et autre citronnade...

Et pendant ce temps là : « Michaud veillait la nuit dans sa chaumière, la la la la....le ciel brillait d’une vive lumière,il se mit à chanter, je vois l’étoile de berger etc (Chant phare de nos cantiques de noël ).
Bonne transition pour vous parler d’étoiles... Il faut dire qu’ici en cette saison, lorsque le ciel est dépourvu de nuages, les nuits tropicales sont merveilleuses à qui sait les voir et les écouter surtout à la campagne , loin des lumières de la ville qui atténuent la luminosité des myriades d’étoiles , qu’elles soient: Vénus ou Beltégeuse , Canopus ou la Polaire.... qu’elles soient étoiles ou planètes, elles nous offrent un spectacle éblouissant qui nous oblige à nous poser mille questions du genre.. « Qui donc est le chef d’orchestre de tant de beauté ?» et la voie lactée qu’est-ce-donc pour des petits-enfants ?

Tandis que le soir tombe et étend son long voile, commence le concert nocturnes des petites grenouilles, des grillons ,criquets et insectes inconnus dans le silence de la campagne, je revois ma mère se balançant doucement dans son rocking-chair,mon frère et moi, 9 et 7 ans allongés par terre sur la véranda, les yeux levés aux ciel, l’écoutions raconter de sa voix douce et traînante de créole cette histoire délicieuse , surranée qui ferait sourire par sa naïveté , nos petits génies d’aujourd’hui, mais que je n’ai nulle honte à transmettre à mes petits-enfants , et que je vous fais partager ce soir.

Un jour alors que la Sainte Vierge Marie donnait la tétée à son fils le Petit Jésus, ce dernier rassasié et repu relâcha brutalement le sein de sa mère, le lait jaillissant en une longue traînée dans le ciel a laissé sa trace pour l’éternité.d'où son nom: La voie lactée

Chaque année à cette époque et à mon âge, j’y repense encore, et mon coeur se remplit d’allégresse, je redeviens pour quelques minutes la petite-fille qui y croyait dur comme fer et qui s’émerveillait de ces légendes, en regardant ce long et grand filao ployant ses bras filamenteux sous les assauts du vent ,et mon père... mon père coupant une branche pour en faire ce qui deviendrait notre sapin de Noël.